Une année studieuse,
Anne Wiazemsky
Ce roman a tout pour
plaire ; du moins selon mes goûts. Je vais donc procéder à l’élaboration
d’une liste aussi courte que possible (ne baillez pas déjà !) pour tenter
de cibler les causes de son succès. En espérant que ces arguments trouveront
écho.
Déjà, ce n’est pas à proprement
parler un roman. Il ressemble en fait davantage à une autobiographie. Or les
autobiographies, plus encore quand il s’agit de celui d’une jeune fille, me
plaisent bien en général. Pour tout dire, je suis une fan inconditionnelle des Mémoires d’une jeune fille rangée. Donc
forcément, un roman comme celui-là, ça me parle !
Pour continuer sur cette lancée,
parlons de l’époque : c’est justement celle de Simone ! Le siècle des
existentialistes, des féministes, de Mai 68, des révolutions en tous genres. Bref, ce roman nous immerge
totalement dans cette époque troublée mais sous haute tension.
Ce roman parle donc
d’étincelles : celles de la révolution, mais aussi celles de l’amour. Il
ne faut pas se laisser méprendre par le titre : cette année qui nous est
contée n’a rien de studieux. Au contraire, elle marque bel et bien un tournant
dans la vie de la petite fille de François Mauriac (oui oui, vous avez bien
lu ! l’autobiographie d’une future écrivaine, descendante direct d’un des
plus grands auteurs du XXème siècle, ça donne l’eau à la bouche non ?)
Celle-ci va faire la rencontre de Jean-Luc Godard, le célèbre cinéaste. C’est
donc sous l’égide de la lumière et sous les feux de la rampe que la vie d’Anne
prend un tournant ; que dis-je, un virage en épingle à cheveu !
Toutefois ne vous y méprenez
pas : comme toute histoire d’amour, celle-ci a ses zones d’ombres. Vivre
avec Godard n’est pas facile. Anne et Jean-Luc s’opposent par leur âge, leur
maturité, leurs désirs. La famille d’Anne se veut aussi un frein à cette
passion insatiable. Les deux amants finissent par se marier (siècle bourgeois
oblige, il faut bien régulariser tout ça !), mais rencontre de nombreuses
crises, dont certaines vont jusqu’à la douleur physique.
Bon, je ne m’aventurerais pas
plus avant dans des considérations politico-sociales, ce n’est pas mon quartier.
Je préfère vous vanter, encore, les vertus littéraires et émotionnelles de ce
roman. Anne Wiazemsky écrit ses souvenirs avec autant d’épaisseur et de
spontanéité que si elle était en train de les vivre au même instant. On sait
tout – ou presque- de ses sentiments, états d’âme, colères et inquiétudes. A 66
ans, elle a investi la peau de celle qu’elle était à 19. Cette année studieuse,
où elle tente d’étudier la philosophie tout en s’imprégnant des bouleversements
de l’époque et de sa vie, ne parvenant pas à s’investir pleinement ni dans
l’une ni dans l’autre, est une année d’apprentissage intense et sans doute trop
pleine pour une jeune fille en fleur (Gaudard dit d’ailleurs d’elle qu’elle est
« un animal-fleur »). Malgré tout, le ton du livre est plutôt gai,
parfois naïf. L’auteur ne nous impose pas le recul qu’on aurait pu attendre
d’un tel retour sur soi; elle nous laisse le plaisir de la fraîcheur, d’une
jeunesse avide de découverte, et à l’appétit d’expériences insatiable. De là à
dire que c’est un éloge de la jeunesse, il n’y a qu’un pas. Mais je ne le
franchirai pas. Pourquoi ? Parce que ça fait trop article de
Télérama !
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