Doggy Bag saison 1, Philippe Djian
Cela fait longtemps que
ces livres sont dans ma bibliothèque, mais je ne m’y étais pas encore lancée.
Une série de bouquins à la manière d’une série télé, cela me laissait septique…
N’en voit-on pas assez à longueur de journée, sur tous les écrans, dans toutes
les langues, et de toutes qualités ? On zappe d’images en images, au
rythme de nos envies, mais également au rythme de ces « soap » qui
enchaînent les épisodes, les répliques cinglantes, les archétypes.
Mais finalement, ayant
besoin de légèreté dans mes lectures en cette période de vacances (l’esprit a
besoin de repos aussi !) je me suis lancée dans le premier opus, que j’avais
emmené, avec une certaine perspicacité, dans ma valise.
En dépit de nombreuses
critiques négatives que j’ai pu lire à son propos, le Doggy Bag de Djian n’est
pas si mauvais. Même s’il est vrai qu’on peut le prendre pour une espèce de
mic-mac de restes de ses autres livres, il n’a pas conservé que les plus bas
morceaux, et a agrémenté les reliefs de ce Doggy Bag d’une saveur inattendue
voire jamais vue.
On retrouve comme
toujours énormément de scènes et de pensées sexuelles. Sans cela, ce ne serait
pas Djian. Les femmes ont encore et toujours une place à part, celle qui
éveille les plus ardents désirs mais qui console et réconforte. Celle qui est
frustrée aussi par les hommes, qui finalement semblent toujours essayer de
mener le monde par le bout de leur… . Bref, vous avez compris.
L’histoire en elle-même n’a rien de transcendant, et s’inspire clairement des
séries télé américaines : deux frères, propriétaires d’un garage,
entretiennent des liaisons ici et là, jusqu’au jour où Edith, l’amour de leurs
20 ans, refait irruption dans leur vie. Raz de marée en jupes courtes, elle
bouleverse littéralement l’équilibre de l’entourage des deux frères. Bon, en
trois lignes, voilà le résumé.
Toutefois je vous ai
parlé de saveur inattendue, et vais essayer de vous persuader que je n’ai pas
menti. Sous couvert de ces clichés, Djian réalise un véritable tout de force
littéraire en nous proposant ce qui s’apparente à un mélange salé de scénario
et de vaudeville. En effet, tout s’enchaîne à une vitesse phénoménale. Les
répliques fusent, les personnages se croisent et se décroisent, les paragraphes
s’enchaînent voire se déchaînent. Il faut parfois avoir le cœur bien accroché
puisqu’au sein d’un même paragraphe il n’est pas rare de passer d’un lieu à un
autre, d’un évènement à un autre, d’un frère à l’autre, enfin voilà. Et ce qu’il
y a de remarquable, c’est que tout s’enchaîne sans que le soufflé s’écrase, et
surtout sans qu’on en perde le fil. Je n’ai finalement au aucun mal à m’y
retrouver (en plus, Djian dresse la liste des protagonistes en début d’ouvrages,
tel un dramaturge, et c’est véritablement ce qu’il est ici !). Je pense qu’une
fois qu’on a accepté de se faire trimbaler à ce rythme effréné, on ne peut que
suivre, ou tout abandonner.
Il est vrai qu'ici Djian ne fait pas de
la grande littérature ni un récit inoubliable, mais que la forme de ces romans
est à couper le souffle (dans les deux sens du terme). Oubliées les
descriptions, oubliés les personnages fouillés. On entre dans les pensées, on
pénètre dans les maisons, on espionne les scènes les plus intimes mais sans s’y
attarder, sans prendre le temps de comprendre réellement ce qui nous arrive. On
est loin loin loin du roman balzacien ; on est face à la modernité
littéraire, celle qui s’imprègne du monde dans lequel on vit, de sa vitesse, de
sa culture, de son besoin de divertissement. Djian nous divertit, à 100 à l’heure,
comme dans une montagne russe qui parfois donne mal au cœur mais nous laisse
toujours un sourire un peu béat aux lèvres.
Je ne sais pas si je vous
ai convaincus mais en tout cas, pour ma part, je pense bien continuer la série !
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