dimanche 2 décembre 2012


Rien ne s’oppose à la nuit, Delphine de Vigan

Il y a de ces livres qu’on lit d’une traite, et qui laissent sur nos vies une marque plus ou moins sensible. Ce dernier ouvrage de Delphine de Vigan, dont je commence à plutôt bien connaître le style – un peu malgré moi je dois dire, au fil des occasions, d’abord No et moi que je n’ai pas lu mais dont on m’a beaucoup parlé, ensuite Jours sans faim qui m’a plutôt marqué, puis Les Heures souterraines qui m’a ébranlée à cause de la vérité assez horrifiante des faits, puis Un soir de décembre, abordé par hasard. Bref, ce dernier ouvrage, encore en grand format, frais émoulu de la plume de son auteur, a été entre mes mains quelques jours, et ce pour des moments forts.
Dans ce livre à matière autobiographique, Delphine de Vigan raconte sa mère, Lucile, la dame bleue, bleu de la mort, bleue de la danse, bleus de la souffrance. Elle brode le canevas de l’histoire de cette femme toujours mystérieuse, dont les parents et les frères et sœurs n’ont jamais su grand-chose. A l’aide de témoignages divers, de carnets retrouvés, de cassettes enregistrées, Delphine de Vigan construit son œuvre. Ce matériau comme elle l’appelle, d’origine familiale, ne laisse personne indifférent, remue les esprits et les cœurs, mais elle avance, il le faut, elle doit le faire, depuis le temps qu’elle dit qu’elle va écrire sur sa mère.

D’abord son enfance, qui m’a fait penser à Simone de Beauvoir, peut-être à cause de l’ambiance parisienne de la famille (pourtant nombreuse ici). Et puis son adolescence, mélange de Beauvoir et Sarraute. Ensuite sa vie adulte, qui ne ressemble à aucune autre, pleine de cris et de folie furieuse. Mais maintenant, j’ai des images plein la tête, issues de ce livre. Il est de ces ouvrages qui laissent des scènes en tête, un peu comme dans un film. Et en plus de cela, il nous amène à penser, à réfléchir, sur la famille, ses malheurs, ses douleurs, ses secrets. Enfin les trois sont un peu la même chose… Le secret est douloureux, la mort est douloureuse, la douleur des siens est une douleur sans fin. C’est peut-être cette douleur que Delphine de Vigan a voulu exhumer pour mieux l’emprisonner, à travers les pages de ce livre. C’est peut-être ça, ce que le jour doit à la nuit…